Quantcast
Channel: Pédale! - SO FOOT.com
Viewing all articles
Browse latest Browse all 139

Nibali, le dernier fuoriclasse .

$
0
0
Pour l'Italie, Nibali est une lueur d'espoir dans un ciel assombri par les affaires de dopage. Marco Pantani, Ivan Basso, Riccardo Ricco ; la Botte en a connu des héros déchus, pris dans la tourmente et par la patrouille. Le Pirate, le Terrible et le Cobra ont fait rêver l'Italie avant de la faire pleurer. Elle se cherche désormais un nouveau champion qu'elle a trouvé en Vincenzo Nibali. Il est le seul à ne pas avoir été éclaboussé par une affaire de dopage. Les Di Luca, Basso, Scarponi, Pellizotti, Ballan, Cunego, Bruzeghin, ont tous été touchés de plus ou moins loin par les suspensions ou les suspicions. Nibali, le dernier des Mohicans, semble planer au-dessus de la mêlée et les tifosi placent désormais leurs espoirs en lui, le Requin de Messine. Lui, le Sicilien aux dents longues.

Né sur les pentes de l'Etna, son père Salvatore lui transmet la passion du cyclisme. Le jeune Vincenzo commence à pédaler à neuf ans. Son paternel lui achète un vieux vélo : « J'ai mis une semaine à le réparer. Une fois mon père l'a repeint dans un rouge semblable aux Colnago des années 80. C'était pas grand-chose mais à l'époque, ça m'a fait rêver ». Sur l'île sicilienne, Vincenzo fait des débuts volcaniques : il est champion d'Italie sur route juniors en 2002 et passe chez les pros à seulement 20 ans à la Fassa Bortolo en 2005. Il réalise de bons résultats et la Liquigas l'engage un an après. L'écurie italienne, consciente de détenir un jeune prodige, le fait mûrir. Puis il franchit les caps, progresse et, peu à peu, gagne ses galons en devenant le fidèle lieutenant des Basso, Pellizotti, ou autre Kreuziger. Le cycliste élancé (1m80 pour 63kg) devient de plus en plus fort et s'affirme sur le Giro : 19ème en 2007, 3ème en 2010, 2ème en 2011.

En 2010, lo Squalo dello Stretto entre dans une nouvelle dimension. Cette année là, il remporte le Tour de San Luis, le Tour de Slovénie, a pour mission d'épauler un Basso sur le déclin pendant le Giro, et surtout rafle le Tour d'Espagne en battant Ezequiel Mosquera de 43 secondes, reléguant Peter Velits à plus de 3 minutes. Il ne remporte aucune étape mais est toujours avec les meilleurs. Ses performances impressionnent les observateurs. C'est dans l'avant-dernière étape de cette Vuelta que le Messineso connait le plus beau moment de sa carrière. Dans l'ascension finale du Bola del Mundo, Nibali, avec le maillot rouge, est en apparente souffrance face à Mosquera. Il laisse partir son rival qui jubile. Mais l'Italien ne s'avoue pas vaincu et va puiser, dans ses dernières ressources, la force nécessaire pour revenir sur le Galicien et ravir son premier Grand Tour à 25 ans. Il livre ses impressions : « C'est le meilleur moment de ma carrière. Cette étape était difficile et pleine de surprises. On m'a vu vaciller face à Ezequiel Mosquera, en fait, je résistais, j'étais au bord de la rupture. Je n'ai pas pu répondre immédiatement aux attaques de mon rival. Les trois derniers kilomètres furent terribles. J'ai concédé 10, 20 secondes. Mais, à la fin, j'ai donné un dernier coup de pédale et on a franchi la ligne en même temps ». Nibali est alors sur la voie des plus grands.

L'année 2011 est également un grand cru : auteur d'un bon Giro où il s'adjuge un contre-la-montre, il collectionne les places d'honneur et louche de plus en plus vers les classiques de printemps. Notamment la course Liège-Bastogne-Liège qu'il affectionne particulièrement. « C'est ma course favorite, j'adorerais la gagner » déclare t-il. Sur l'édition 2010, il a obtenu une solide 8ème place. Cette année, l'Italien est revanchard et s'élance sur La Doyenne, longue de 260km avec des rêves de succès. Il prend la tête de la course, creuse l'écart dans la descente de la côte de la Roche aux Faucons, et compte jusqu'à 30 secondes d'avance à 12 km de l'arrivée. Habile dans l'exercice solitaire, on pense alors que le Sicilien va décrocher sa première classique de renom. Mais le rusé Iglinsky fond sur lui alors que l'Italien cale, oxydé par l'effort. Il est finalement repris sous la flamme rouge par le Kazakh qui le déboite et gagne en solitaire. Nibali connait alors un dur revers et tente de cacher sa tristesse: « Bien sûr, il y a de la déception mais je ne vais pas m'arrêter à ça et j'ai quand même fait une très bonne course, une grande course même ».

De nature offensif, le Requin est l'antithèse du suceur de roue à la Cadel Evans. Virevoltant dès que la pente s'élève, Nibali n'en est pas moins un rouleur solide, capable de limiter la casse sur les 100 km de contre-la-montre. Mais ce n'est pas dans les montées que le gamin de Messine impressionne le plus. En haute montagne, une fois le col franchi, le squale plonge vers la prochaine vallée à la vitesse d'un météore. Il tutoie alors la perfection. Sa clairvoyance et sa technique font de lui un descendeur hors-pair, le plus doué du peloton. Ce coureur au sang-froid imperturbable dévore les pentes tout en maîtrise et à une vitesse hallucinante qui frôle parfois les 110 km/h. Il prend des trajectoires parfaites et relance au bon moment. Cet exercice de style est son domaine de prédilection, où il n'a pas son pareil. Seul Savoldelli pouvait rivaliser avec lui à une époque. Et même les motos ont du mal à le suivre. Cette année, il a remporté une étape sur le Giro où il a fait parler ses qualités en dévalant le Monte Grappa. Et les descentes du col de Richemond aujourd'hui ou du col de Peyresourde dans les Pyrénées pourront permettre à Nibali de rattraper son retard au général et même de glaner une victoire d'étape pour la Liquigas, pas rassasié par les trois succès de Peter Sagan.

L'homme a aujourd'hui 27 ans ; âge idéal où le corps atteint une maturité physique et l'esprit une expérience tactique. Absent sur la Grande Boucle depuis 2009, Nibali a fini d'être un équipier qui cherche à progresser. Maintenant, il est là pour gagner et non plus pour apprendre. Le squale arrive sur le Tour 2012 en leader, avec les crocs acérés et les dents aiguisées, prêt à dévorer ses rivaux lorsque les pourcentages parleront. Même si un podium le satisferait, avec le soutien d'Ivan Basso et l'aide du solide Sylwester Szmyd en montagne, Nibali a les moyens d'être en jaune sur les Champs. Mais pour cela, il va falloir se montrer offensif : « Je suis prêt à attaquer. Je dois forcer ma nature. Mais le tour ne se gagne pas en descente ». L'Italien va devoir s'entendre avec l'Australien Cadel Evans s'il veut provoquer la chute de Wiggins. Il reste confiant : « Ce duo de Sky, il a été battu à la Vuelta par Juan José Cobo, non ? ».

Lors d'une interview en 2011, Vincenzo confiait: « Quand je suis sur la route, je ne pense à rien, ça permet à mon esprit d'être libre ». Espérons qu'il pensera quand même à attaquer dans les montées mais surtout dans les descentes pour bouleverser la hiérarchie du général.

Par Théophile Leroy

Viewing all articles
Browse latest Browse all 139

Trending Articles